La galerie Mathilde Hatzenberger présente l’œuvre singulière de l’artiste française Mai Tabakian. Le mot singularité n’est pas choisi au hasard comme un terme typiquement emprunté pour décrire un travail artistique émergeant du lot… Il est ici porteur de tout le sens que l’artiste donne elle-même à sa création : archaïque, hors norme, archétypale. La dualité explorée par Mai Tabakian est d’abord sémantique, entremêlant les significations et les références faisant naître un dialogue entre l’Orient et l’Occident : les signifiants asiatiques et leurs traductions européennes. Les œuvres sont abstraites et empruntées au Pop art, mais en dépassant les premières références à notre histoire de l’art, on voit émerger un chapeau traditionnel vietnamien dans les cônes. Moins esthétique, et plus philosophique, on perçoit soudainement la spirale et tout ce qu’elle évoque en nous. Celle du temps qui s’écoule comme le rappelle la pelure du citron dans les natures mortes du 17ème ? Le temps cyclique, hellénique, cosmogonique de notre culture gréco-romaine.
Le mythe est un élément central chez Mai Tabakian. Les mises en abîmes propres à nous faire réfléchir sur nous, notre condition, sont présentes dans l’œuvre Flying Targets. Est-ce comme certains l’expriment une tour de Babel ? Un trou noir aspirant ? Est-ce que la singularité s’y trouverait en son centre ? Ou bien est-ce ce moment de calme extraordinaire au cœur de la tornade ? Terme cher à l’astronomie, la singularité est une région de l’espace où rien ne peut échapper à la gravité. Gravité de notre condition de mortel ? L’entrée du vivant et de l’organique dans ces compositions singulières est essentielle pour respecter l’harmonie : le yin et le yang, le dyonisiaque et l’apollinien, le pulsionnel et le cérébral, chaos et cosmos. Mai Tabakian n’oublie pas pour autant l’humour ! Les titres données à ses œuvres sont plein de tendre dérision sur la gravité de la vie sur terre qui n’est que poussières d’étoiles dans un univers infini. C’est l’équilibre permanent du temps, qui selon Aristote, n’est ni demain, ni hier, ni aujourd’hui car sans cesse en mouvement. Le dessin est le fil, acte créateur et féministe en hommage à Louise Bourgeois ou Niki de Saint Phalle. Une belle œuvre à décortiquer au Rivoli Building.
Aurore t'Kint
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